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Frère Laurent de la Résurrection : sept conseils pour rencontrer Dieu

Au XVIIe siècle, un modeste Frère convers a mis au point une méthode pour trouver Dieu. Denis Sureau, qui l’a expérimentée, nous la partage dans son dernier ouvrage.


Cette réflexion est tirée d'un article d'Élisabeth Caillemer, paru le 7 avril 2020 dans le Magasine web Famille chrétienne.


« Lorsqu’on aime quelqu’un ou quelque chose, on éprouve l’irrésistible désir d’en parler. » Il y a dix ans, sur les conseils de son Père spirituel, Denis Sureau découvrait la spiritualité de Laurent de la Résurrection, un humble Frère convers des carmes déchaux qui vécut au XVIIe siècle (1614-1691) et qui mit au point une pratique ultra-simple pour vivre la présence de Dieu. Sa vie spirituelle en fut bouleversée. Tel André Frossard qui n’avait pu garder pour lui seul la joie de découvrir l’existence de Dieu, Denis Sureau partage aujourd’hui sa découverte dans un livre profond et accessible. « Laurent de la Résurrection, écrit-il, a expérimenté un chemin d’ascension vers Dieu dont l’apparente simplicité risque de marquer la radicale verticalité, car ce sont les voies vers les hauteurs du grand Présent qu’il nous invite d’emprunter, doucement mais sûrement. » Si vous savez que Dieu existe mais que vous ne L’avez pas (vraiment) rencontré, « marchez dans les pas de Frère Laurent, invite Denis Sureau, c’est un bon guide. Sa pratique est pratique. Elle s’adapte à tous les caractères, toutes les conditions, toutes les situations. Elle n’exige pas un doctorat de théologie [...]. Elle unifie la vie, brisant tout mur entre le spirituel et le temporel, le religieux et le profane ». Voici sept conseils que nous avons retenus.


1. Savoir que Dieu est là, présent en nous

« Il n’est pas nécessaire d’être toujours à l’église pour être avec Dieu, nous pouvons faire de notre cœur un oratoire dans lequel nous nous retirions de temps en temps pour nous y entretenir avec Lui doucement, humblement et amoureusement », écrit le Frère Laurent. Nous retrouvons ici cette fameuse intuition de saint Augustin : « J’ai beaucoup travaillé à Vous chercher au dehors quand Vous étiez au plus profond de moi. » Dieu habite en nous, il faut partir à sa recherche. Nul besoin de parcourir des kilomètres. C’est ce que Denis Sureau nomme joliment « un pèlerinage au cœur de l’âme ».


2. Désirer Le trouver vraiment

À l’abbé Joseph de Beaufort, dont il assurait la direction spirituelle et qui deviendra plus tard son biographe, Laurent de la Résurrection explique que « Dieu donne lumière à ceux qui ont le véritable dessein d’être à Lui ». Lui-même a posé un jour un acte de volonté pour y parvenir vraiment et précise qu’« il ne faut ni finesse ni science pour aller à Dieu, mais seulement un cœur résolu de ne s’appliquer qu’à Lui ou pour Lui et de n’aimer que Lui ». La barre vous semble déjà un peu trop haute ? Le Frère Laurent vous rassure : « Tout le monde est capable de ces entretiens familiers avec Dieu, les uns plus, les autres moins, Il sait ce que nous pouvons ; commençons, peut-être n’attend-Il de nous qu’une généreuse résolution. »


3. S’adresser à Lui sans cesse

C’est ce que le Frère Laurent nomme la « conversation continuelle ». Elle ne possède pas de règle particulière. Laurent l’a mise au point parce que les méthodes d’initiation à la vie spirituelle enseignées dans son couvent lors de son noviciat, trop compliquées, ne lui convenaient pas. La pratique de la présence de Dieu « en quoi consiste toute la vie spirituelle » invite à « nous accoutumer à une conversation continuelle avec Lui sans mystère ni finesse », explique-t-il. Nous pouvons, par le biais de petites phrases, Le louer, Lui demander son aide, sa grâce, Lui offrir nos peines, Le remercier pour les grâces qu’Il nous a accordées. « Une petite élévation du cœur suffit, un petit souvenir de Dieu, une adoration intérieure... Pour courtes qu’elles soient, ces prières sont très agréables à Dieu », nous dit le carme. Nous pouvons Lui parler à tout moment, « surtout dans les temps des tentations, des peines, des aridités, des dégoûts et même des infidélités et des péchés ».

Frère Laurent dans le texte


4. Agir là où Dieu nous a placés

Concrètement, cette conversation peut avoir lieu à n’importe quel moment de la journée : avant, pendant, après une action particulière qu’elle soit matérielle, intellectuelle ou spirituelle. Nul besoin que cette action soit grandiose ou révolutionnaire. Le Frère Laurent, qui a été pendant quinze ans le cuisinier de son couvent, nous rassure : « Il n’est pas nécessaire d’avoir de grandes choses à faire, je retourne ma petite omelette dans la poêle pour l’amour de Dieu. » Le Père François de Sainte-Marie (1910-1961), de l’ordre des Carmes déchaux, qualifiait le Frère Laurent de « mystique du devoir d’état ». Sainte Thérèse d’Avila ne conseillait rien de bien différent : « Faire les choses ordinaires de manière extraordinaire. »


5. Laisser de côté notre science

Laurent de la Résurrection n’était pas un grand intellectuel, bien qu’il sût lire et écrire. Dans son couvent, il était Frère convers, ce qui signifie qu’il n’était pas tenu de participer à tous les offices de sa communauté et que sa vie était plus orientée vers les tâches matérielles. Il privilégiait la connaissance de Dieu par la foi. Laurent ne dédaignait pas pour autant les recherches intellectuelles et les spéculations théologiques qui sont utiles et même indispensables, remarque Denis Sureau, mais il estimait que les livres et les sermons ne remplacent pas la quête personnelle de ce Dieu plus intime que nous-même. « Nous cherchons dans le raisonnement et dans les sciences, comme dans une mauvaise copie ce que nous négligeons de voir dans un excellent original, disait-il. Dieu Lui-même se peint au fond de notre âme, et nous ne voulons pas L’y voir : nous Le quittons pour des badineries et dédaignons de nous entretenir avec notre Roi. »


6. Redonner leur juste place à nos dévotions

Non pas qu’il faille abandonner la récitation du chapelet, des neuvaines ou des prières habituelles. Le Frère Laurent nous invite à bien les connecter vers leur but premier : se rapprocher intimement du Père. Faute de quoi, commente Denis Sureau, elles peuvent « donner l’illusion d’une fausse piété, procurer un aimable contentement de soi, qui n’est que l’odieux simulacre de la sainteté ». À une religieuse dont il assurait la direction spirituelle il conseillait de se défaire de « quantité de dévotions particulières quoique très bonnes, mais dont on se charge souvent mal à propos, puisque enfin ses dévotions ne sont que des moyens pour arriver à la fin. Ainsi lorsque par cet exercice de la présence de Dieu nous sommes avec Celui qui est notre fin, il nous est inutile de retourner aux moyens ».


7. Ne pas se décourager dans la sécheresse

Laurent reconnaît que « le commencement est difficile », qu’« on croit que c’est du temps perdu, mais il faut continuer à se résoudre d’y persévérer jusqu’à la mort et malgré toutes les difficultés ». Lui-même a connu durant dix années la nuit des sens, suivie de la nuit de l’esprit, au cours desquelles il gardera malgré tout confiance en Dieu auquel il s’abandonne tout entier. « J’ai beaucoup souffert, l’appréhension que j’avais de n’être pas à Dieu comme je l’eusse souhaité, mes péchés passés toujours présents à mes yeux, et les grandes grâces que Dieu me faisait étaient la matière et la source de tous mes maux, durant tout ce temps je tombais souvent et je me relevais aussitôt, il me semblait que les créatures, la raison et Dieu même fussent contre moi, et que la foi seule fût pour moi. » Mais il assure que les efforts sont récompensés par des « effets merveilleux », une profonde paix intérieure de l’âme, « comme si elle était en son centre et en son lieu de repos ».


Qui était Laurent de la Résurrection ?

Nicolas Herman naît en 1614, à Hériménil en Lorraine. À l’âge de 18 ans, il acquiert la certitude que Dieu existe en observant pousser tour à tour les feuilles, les fleurs, puis les fruits d’un arbre. Peu de temps après, il s’engage comme soldat dans les troupes du duc de Lorraine alors en guerre contre les Français. Grièvement blessé, il quitte la carrière des armes à 21 ans et s’essaie à la vie érémitique. Insatisfait, il devient laquais à Paris puis entre à 26 ans comme Frère convers au couvent des carmes déchaux de la rue de Vaugirard. Il prend le nom de Frère Laurent de la Résurrection et y exerce le métier de cuisinier, avant de devenir savetier. Obsédé par ses péchés passés, il vit douloureusement ses premières années religieuses. Sa décision de s’abandonner tout entier dans les mains de Dieu donne un coup d’accélérateur à sa vie spirituelle qu’il décide de conduire à sa façon : vivre chaque instant de sa journée en conversant avec le Père. Son rayonnement spirituel lui attire de nombreuses visites, parmi lesquelles l’abbé Joseph de Beaufort, vicaire général du cardinal de Noailles, qui deviendra son biographe, ainsi que Fénelon. Il meurt en 1691. Associé à tort au quiétisme, il sera oublié en France, tandis qu’à l’étranger, notamment aux États-Unis, sa spiritualité de la présence de Dieu séduit de nombreux chrétiens. On en retrouve certains thèmes chez sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus et sainte Élisabeth de la Trinité, bien que celles-ci ne l’aient probablement jamais lu.


Élisabeth Caillemer

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